Ce moment où l’on aimerait être kényan: les peuples qui s’affranchissent

4 septembre 2017

Ce moment où l’on aimerait être kényan: les peuples qui s’affranchissent

 <<La grandeur d’un pays réside dans sa fidélité à la constitution, dans le strict respect de la loi et surtout dans la crainte de Dieu.>> David MARAGA

Scènes de liesse et concert de klaxons dans les rues de Kibéra, Bahiti, Lang’ata et autres, à Naïrobi! Stupéfaction surprise et étonnement sur le continent! Pour une troisième fois seulement dans l’histoire du monde et une première fois dans l’histoire de cette Afrique trop meurtrie par les errements de ses fils, une cour suprême contrecarre les aspirations d’un pouvoir en place.

Quel bonheur de voir un État africain se soustraire au club des cancres de la démocratie pour affirmer clairement sa souveraineté et son désir d’avancer sur les voies de la liberté…

Elle est vraiment lourde de conséquence, cette décision de la cour suprême kényane invalidant le scrutin présidentiel tenu au mois d’août passé, et qui donnait comme victorieux, le président sortant Uhuru KENYATTA, après avoir commencé par jeter le pays dans l’éternel cycle d’irrégularité- contestation-violence-et éternité au pouvoir.

<<La grandeur d’un pays réside dans sa fidélité à la constitution, dans le strict respect de la loi et surtout dans la crainte de Dieu. À la question de savoir si les illégalités et irrégularités ont affecté l’intégrité de l’élection, la cour est d’avis que c’est le cas et par conséquent, la validité de l’ensemble du scrutin est remise en cause. >> a affirmé le juge David MARAGA, président de la cour suprême de ce pays. Quel cran! Quel courage!

Sur ce continent où on est plus habitué à la réticence des oppositions politiques à aller manifester leur désaccord avec les résultats de scrutin devant les cours, ce désir abouti de l’opposant septuagénaire Raila ODINGA qui peut peut-être caresser le rêve de ses envies de président, sonne comme une note d’espoir, un début de construction vaille que vaille d’un réel édifice démocratique en Afrique, beaucoup plus solide que ce qui a été obtenu à ce jour.

Pour se faire mieux comprendre, prenant son air le plus solennel, la cour suprême kényane a affirmé ce qui suit: « la commission électorale a failli et fait preuve de négligence, ou refusé de couvrir les élections en accord avec les lois électorales. Y’a-t-il irrégularités lors du scrutin? Oui! Poursuit le juge, il y en a eu dans la transmission des résultats, avant de conclure, avec la précision et l’assurance de ceux qui sont sûrs de leur mission, les résultats de l’élection présidentielle sont donc nuls et non avenus.

En attendant que les juges fournissent dans quelques jours les éléments qui leur ont permis de rendre un tel verdict, que les uns ou les autres le veuillent ou non, il faudra reconnaître qu’un vent de renouveau démocratique souffle sur ce continent. En Afrique de l’ouest où l’on s’est visiblement habitué à voir s’éterniser au pouvoir des dirigeants qui sont au final devenus pesants et indésirables dans le quotidien des peuples, on a vu organisées entre les années 2015 et 2016, au moins une dizaine de scrutins présidentiels qui ont vu quatre candidats sortants, déchus de leur piédestal, phénomène quasi inimaginable quelques décennies auparavant.

On n’organise pas des élections pour les perdre!!! Se disait-on fièrement dans les cercles des pouvoirs en place.

En ce début de mois de septembre 2017, cet État de l’Afrique centrale déjà par le passé avili par les errements de sa classe politique vient de donner une leçon de grandeur à ses pairs. Même si dans soixante jours, puisque c’est le délai fixé par la cour pour réorganiser un nouveau scrutin, l’opposition kényane n’arrivait pas à remporter lesdites élections, au moins cette espèce de fatalisme qui décourage d’avance les candidats aux différentes élections sur le continent ne trouvera plus de réel écho. C’est en effet une belle jurisprudence à laquelle d’autres pays, d’autres nations doivent offrir un bon retentissement en prenant à chaque fois que cela se doit, le courage de dire les choses telles qu’elles se présentent, sans jamais devoir songer à faire plaisir seulement à un parti un clan ou un simple individu.

À ces toutes missions dites d’observateurs internationaux qui viennent superviser les scrutins, l’échec retentissant de celle qui a opéré ce 08 août 2017 au Kénya, pour avoir conclu avec une pointe de perfidie, à des élections déroulées dans les meilleures conditions, l’on a envie de crier honte, pitié et incompétence.

Au président sortant Uhuru KÉNYATTA, s’il est un conseil à donner, c’est de se plier à cette décision de la cour, comme a-t-il semblé déjà le faire, malgré lui, et ce ne serait que marque de grandeur d’âme, car persister dans un éventuel forcing ne pourrait que lui causer des désagréments. <<Des millions de kényan ont fait la queue, ont fait leur choix, et six personnes ont décidé qu’elles iraient contre le choix du peuple>> a-t-il affirmé en substance. Et justement, pour tâcher d’être parfait dans ce qui se joue comme un véritable tournant dans la destinée des peuples, il faudra trouver le moyen de rehausser le niveau de sécurité autour de David MARAGA le président de cette cour suprême, pour que l’on ne vienne pas dire à la face du monde que ce fils du continent aujourd’hui éclairé à écrire de belles pages de l’histoire, aurait subitement décidé de se donner la mort, ou que sa voiture aurait fini dans des ravins, ou encore qu’ils se serait volatilisé dans la nature. Bref! Dieu nous en garde, qu’il ne lui arrive pas malheur en chemin!

    En 2015, Sylver  PAGARITCHÉ, président de la cour constitutionnelle du Burundi avait fait preuve d’une grande bravoure en révélant les menaces de mort proférées contre lui et ses pairs jugés constitutionnels si jamais ils se prononcaient contre la légitimité d’un troisième mandat que convoitait le président de la République Pierre N’KURUNZIZA. Après avoir mis au grand jour ce qui se tramait dans l’ombre, le président de la cour a choisi de fuir plutôt que de se décrédibiliser; de ce courage qui manque tant dans cette Afrique. À sa place, d’autres valideraient cette injustice par couardise par servilité et surtout pour l’intérêt qu’ils pensent souvent en tirer en espérant gagner une place au bord de la mangeoire, lorsque leur « champion » aura réussi son coup de force.

    Plus tôt en mai 2009, la cour constitutionnelle du Niger a également trouvé le cran pour contrecarrer les projets de référendum du président Mamadou TANDJA aux fins de modification du régime électoral pour se porter à un troisième mandat, violant de ce fait la loi fondamentale. Certes, il s’est résolu à dissoudre cette cour ainsi que toutes les autres institutions de la république contrariant ses desseins, pour ensuite se faire réélire en août 2009. Mais déjà en février 2010, le sort l’a rattrapé sous la forme d’un coup d’État que l’on se devrait presque d’applaudir. <<La démocratie a besoin d’hommes courageux et crédibles>> comme dirait quelqu’un. 

    Hommes courageux à l’image de François Akila BOKO encore plus tôt en 2005 au Togo où, ministre de l’intérieur, cet homme a préféré démissionner après avoir levé le voile sur les sombres projets par lesquels le pouvoir entendait imposer son candidat Faure Essozimna GNASSINGBÉ, envers et contre la vérité des urnes. Après cela, monsieur BOKO a dû s’éclipser pour sauver sa peau. La suite, on la connaît.

    << L’espoir des peuples africains réside dans le fait que quelle que soit la brutalité des régimes, ils demeurent des François BOKO, des Sylver PAGARITCHÉ>> ou encore des David MARAGA. Jean-Baptiste PLACCA.

Gbégnédzéanyi.

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